Une nouvelle approche du traitement du cancer à l’aide des médicaments de nos armoires à pharmacie.
Le coût des médicaments contre le cancer explose. S’intéresser aux médicaments utilisés dans d’autres maladies pour traiter le cancer représente une occasion unique pour les patients et les systèmes de santé.
La réduction constante du coût du séquençage de l’ADN a ouvert la voie à une médecine de précision et un nombre croissant d’essais cliniques sont conçus en fonction du profil génétique spécifique des tumeurs des patients.
Malheureusement, les chercheurs et les médecins doivent désormais faire face à un scénario complexe et inédit.
Tout d’abord, les systèmes de santé des quelques pays qui peuvent se payer les nouvelles thérapies ciblées contre le cancer ne pourront bientôt plus continuer à supporter leur coût exorbitant.
Le coût moyen d’un nouveau médicament contre le cancer est passé de 100 $ par mois dans les années 1990 à 10 000 $ par mois en 2011. Malheureusement, rien ne permet de penser que cette situation va s’améliorer dans un futur proche.
Deuxièmement, les résultats de l’étude génétique des cancers révèlent une complexité plus grande que prévu, confirmant la nécessité d’associer plusieurs traitements au lieu d’utiliser un seul médicament à la fois.
Associer plusieurs médicaments n’entre néanmoins pas dans la stratégie traditionnelle de l’industrie pharmaceutique dont les essais cliniques sont conçus pour obtenir l’autorisation de mise sur le marché d’un nouveau médicament à la fois, et pour une seule indication.
À la lumière de cette situation, dans un article paru dans Nature Reviews Clinical Oncology intitulé Drug repurposing in oncology—patient and health systems opportunities
Le repositionnement de médicaments en oncologie, une chance pour les patients et les systèmes de santé], Francesco Bertolini de l’Institut européen d’oncologie à Milan (Italie), Vikas Sukhatme de la Faculté de Médecine de Harvard et de GlobalCures à Boston (États-Unis) et Gauthier Bouche du Fonds Anticancer à Bruxelles (Belgique) proposent une nouvelle voie aux avantages nombreux pour les patients et les systèmes nationaux de santé.
De nombreux médicaments disponibles pour diverses maladies pourraient être réutilisés en oncologie. Cette stratégie est connue sous le nom de repositionnement de médicaments et représente une occasion unique d’associer plusieurs médicaments à la fois.
Le développement préclinique et clinique est potentiellement plus sûr, car les effets secondaires sont connus, mais aussi plus rapide et moins cher, car les connaissances acquises sur ces médicaments réduisent le temps et le travail nécessaires à la poursuite des recherches.
Des partenariats entre gouvernements, systèmes de santé et fondations permettraient de soutenir le développement clinique, avec des avantages évidents pour tous les acteurs.
Les success stories du repositionnement de médicaments en oncologie restent peu nombreuses, mais celles qui existent ont eu un impact majeur, illustré par l’histoire de la thalidomide. La thalidomide, rendue tristement célèbre pour ses effets tératogènes graves survenus dans les années 60, est maintenant utilisé avec succès pour traiter le myélome multiple.
Notre bonne vieille aspirine est un autre succès de repositionnement, par son rôle dans la prévention du cancer du côlon.
L’Institut européen d’oncologie, Global Cures et le Fonds Anticancer sont déjà activement impliqués dans des projets de repositionnement de médicaments.
Chacune de ces organisations réalise des études précliniques et des essais cliniques de médicaments peu chers et de faible toxicité. Il semble donc opportun que les gouvernements, les systèmes nationaux de santé et les autres organismes de financement s’engagent pleinement dans ce type de recherche.
Un tel engagement faciliterait cette approche thérapeutique, avec, à la clé, la possibilité d’aider rapidement et efficacement les patients atteints de cancer, dans le monde entier.
Source d’information : Fonds Anticancer
Nature Reviews Clinical Oncology ((publication le 20 octobre 2015):